dimanche 26 avril 2009

Dénominateur commun (1)

Lorsque deux nombres a et b doivent être additionnés, l’addition ne peut être effectuée que si ces nombres sont exprimés au moyen d’une unité commune. Ainsi, pour additionner 3 dizaines et 4 unités, ces deux nombres doivent être exprimés, par exemple, en dizaines donc 3 dizaines et 0,4 dizaine ou en unités donc 30 unités et 4 unités. On obtient alors 3,4 dizaines ou 34 unités.

En algèbre la somme de a et de b restera a + b tant qu’une unité commune ne sera pas connue. Par exemple si a = 5c et b = 3c alors, puisque 5c + 3c = 8c, a + b = 8c. Le problème se pose aussi pour additionner des fractions telles 1/2 et 1/3.

Afin d’aider les élèves à additionner des fractions, il faut d’abord leur faire ressentir l’importance d’une unité commune. Ceux-ci sont dans une des deux positions suivantes : des novices ou des initiés. Chez les initiés, certains savent comment additionner des fractions, qu’ils le comprennent ou non, alors que d’autres sont en échec.

Activité pour les novices

Écrivez les propositions mathématiques suivantes et, demandez à chaque fois aux élèves de les compléter :

3 dizaines + 4 dizaines =
3 mètres + 4 mètres =
3 heures + 4 heures =
3 cinquièmes + 4 cinquièmes =

Habituellement les élèves complètent cette dernière proposition par 7 cinquièmes. Faites-leur remarquer que toutes ces propositions peuvent s’écrire de façon abrégée :

30 + 40 = 70
3 m + 4 m = 7 m
3 h + 4 h = 7 h
3/5 + 4/5 = 7/5

Dites-leur ensuite qu’ils se sont pas trompés en complétant la dernière proposition. Acquiescez au fait que 3 + 4 = 7 en montrant les numérateurs, mais montrez que 5 + 5 n’est pas égal à 5, mais à 10 pour les dénominateurs.

S’ils ont compris, ils vous diront que des dizaines additionnées à des dizaines donnent des dizaines et non des centaines, que des mètres additionnés à des mètres donnent des mètres et non des kilomètres, donc que des cinquièmes additionnés à des cinquièmes donnent des cinquièmes.

Félicitez-les et proposez 3x + 4x = ___ Certains vous demanderont ce que les x signifient, dites-leur que vous l’ignorez. Attendez-vous à une réponse du genre : « Ce n’est pas grave et cette addition donne 7x de toute façon.».

Activité pour les initiés

Il faut d’abord s’assurer qu’ils comprennent l’importance du dénominateur commun alors nous allons jouer avec eux quelque peu.

Au tableau, écrivez 1 + 4 = ___ et demandez-leur de compléter. Attendez-vous à ce qu’ils répondent 5, ce qui n’est pas bête… Et pourtant, vous allez dire que la réponse est onze (11). Étonnement assuré ! Pas seulement de la part des élèves… n’est-ce pas ?

Maintenant intercalez le mot semaine et les mots jours comme suit :

1 semaine + 4 jours = 11 jours

Proposez-leur un nouvel essai.

1 + 1 = ___

Certains diront deux, d’autres huit, d’autres… Écrivez 25 en intercalant jour et heure(s) comme suit :

1 jour + 1 heure = 25 heures

Ils comprendront alors l’importance du dénominateur commun et ne seront pas prêts d’oublier ces minutes d’étonnement et d’inquiétude.

La semaine prochaine : Comment trouver le dénominateur commun grâce à une image mentale simple.

Robert Lyons

dimanche 19 avril 2009


Termes manquants, relatifs et algèbre

À part six années d’études, quelles différences y a-t-il entre 3 + ___ = 5 et 3 + x = 5 ? À part quatre années d’études quelles différences y a-t-il entre +6 –2 = +4 et –6 +2 = –4 ? Si l’on ne considère que l’aspect mathématique, il n’y a aucune différence entre les deux premières équations et il n’y a aucune différence entre les deux dernières égalités.

Cependant, en apprentissage les différences sont énormes et cela se remarque par de nombreuses difficultés surmontées difficilement par les élèves. Pourquoi ? À cause des années d’écart entre la présentation des diverses phrases mathématiques mentionnées plus haut.

Voici donc une activité qui servira aussi bien à introduire l’addition et la soustraction avec ou sans terme manquant chez les élèves de six ans. La même activité peut être utilisée auprès des élèves de dix ans au moment d’introduire les entiers relatifs et chez les élèves de douze ans pour aborder l’algèbre.

Activité

Questionnez d’abord les élèves afin de savoir quels sont ceux qui pratiquent des sports d’équipe. Demandez-leur de mentionner les noms de quelques équipes qu’ils connaissent. Continuez en disant qu’en mathématiques les équipes ne s’appellent pas les Ours ou les Gazelles, mais les Plus et les Moins. Assurez-vous que les élèves connaissent un sport d’équipe pour lequel chaque but vaut un point. Le hockey, le baseball ou le soccer par exemple.

Tracez ensuite le tableau suivant :

Racontez que, lors d’un match de…, l’équipe des + a marqué trois buts alors que celle des – n’en a obtenu qu’un seul. Demandez quelle équipe a gagné ? Notez + sous le tableau. Et par combien de buts ? Ajoutez 2. Vous avez donc écrit +2. Recommencez avec +2 et –5. D’accord, au Québec l’équipe des – ne peut gagner avant que les élèves soient en cinquième année, donc âgés de dix ans. Mais les élèves de six ans ne lisent pas les programmes d’études et ne savent pas qu’ils sont trop jeunes pour comprendre que +2 –5 = –3 tout en comprenant que +5 –2 = +3. Profitez de leur ignorance et oubliez la science des auteurs de programmes. N’hésitez donc pas à proposer :





Après trois ou quatre autres problèmes du genre dont +3 –3 = ±0, proposez :




Notez aussi ce qui précède comme suit : +4 – ___ = +3 et + ___ –2 = +1. Faites remarquer que ces deux traits – ___ dans +4 – ___ = +3 pouvant prêter à confusion, le nombre à trouver sera désormais indiqué par x, d’où :





Encore une fois, ne parlez pas de programmes et d’algèbre. Laissez les élèves, même ceux de six ans, s’attaquer à ces problèmes en… toute innocence.

Voilà donc tel que promis, une activité très simple qui peut éviter à vos élèves de solides et persistantes difficultés d’apprentissage qui ne dépendent ni des mathématiques, ni des capacités des élèves, ni de vos talents, mais bien des dogmes professés par des penseurs trop souvent incapables d’enseigner.

À vous sur http://wwwmathadore.blogspot.com/


Robert Lyons

La semaine prochaine : Comment aborder l’enseignement de l’addition de fractions ?

lundi 13 avril 2009

Préscolaire : contenu disciplinaire (4)

Jusqu’à maintenant, les activités proposées ont porté sur la correspondance directe entre une quantité à dénombrer ou à mesurer. Il s’agissait toujours de comparer un ensemble à un nouvel ensemble ou une longueur à des bâtonnets qui servaient d’unités de longueur. C’est un premier pas vers la compréhension de la mesure et du dénombrement. Tentons de franchir le pas suivant.

Imaginez qu’il faille comparer deux ensembles d’objets distants ou simplement la largeur d’une table et sa longueur. Cette fois, la comparaison directe est impossible ou peu pratique. Il faudra utiliser un outil intermédiaire. Lorsqu’il s’agit de dénombrer des ensembles, la comptine des nombres : un, deux, trois… joue ce rôle alors que la règle fait un travail équivalent en mesure.

Activité

Chaque élève reçoit entre quinze et vingt jetons. Il doit les laisser sur sa table de travail. Dans un coin éloigné de la classe, disposez un ensemble de seize jetons.

Les élèves peuvent déplacer les jetons qui sont sur leur table et ceux qui sont sur la table éloignée. Cependant, ils ne peuvent que les déplacer sur les tables où ils sont, jamais les transporter ailleurs.

Leur travail consiste à établir la comparaison entre le nombre de jetons qui sont sur leur table et le nombre de jetons qui se trouvent sur la table commune.

Laissez-les discuter du problème et proposer des idées de solutions qu’ils devront tester lorsqu’ils seront à court d’idées.

Voici diverses possibilités ou divers intermédiaires possibles.

1. Compter les éléments de chaque ensemble.
2. Prendre un autre ensemble de jetons et l’associer à chaque ensemble.
3. Faire des arrangements comparables avec les jetons de chaque ensemble. Par exemple, faire tous les paquets possibles de cinq jetons ou encore disposer les jetons en triangles ou en carrés :


4. Pousser à l’écart un jeton de l’ensemble commun et aller faire la même chose avec l’ensemble personnel. Continuer jusqu’au moment où tous les éléments d’un ensemble aient été mis à l’écart.

Notes :

Considérant tous les courriels d’abonnement que j’ai reçus récemment, en provenance du personnel du préscolaire, je me rends compte que la description d’activités plaît beaucoup. Mais j’ai en même temps l’impression de laisser tomber mes lecteurs qui travaillent à d’autres degrés.

Pour cette raison, à compter de la semaine prochaine, je proposerai en alternance des activités pour tout le primaire et… peut-être pour le secondaire.

Et le projet de programme – Il reste là en arrière-plan. Sans doute que la lecture et l’expérimentation des activités que je vous décris servira à préciser et à valider le contenu éventuel de ce programme.

À vous !


Robert Lyons

dimanche 5 avril 2009

Préscolaire : contenu disciplinaire (3)

Cette semaine, voici une nouvelle activité qui développe le concept du nombre. Encore une fois elle peut être réalisée sans que la terminologie numérique n’intervienne. Cela n’est d’ailleurs pas souhaitable pour plusieurs élèves qui, bien que connaissant la comptine des premiers nombres, n’en saisissent pas nécessairement le sens. Avec les élèves qui savent compter correctement et qui comprennent ce qu’ils font, laissez-les vous le démontrer mais demandez-leur d’imaginer d’autres solutions.

Le loup nous a-t-il visité ?

Afin de solutionner les problèmes de cette activité, les élèves devront mettre de l’ordre dans l’ensemble d’éléments à surveiller ou utiliser un ensemble d’objets ou de symboles qui serviront de témoins. Mettre de l’ordre est une des obligations de base lors de grands dénombrements alors que l’ensemble d’éléments témoins est à la base de la compréhension du rôle des nombres.

Placez devant chaque élève un nombre de quatre à six jetons. Racontez-leur que ces jetons représentent des moutons alors qu’eux sont les gardiens des troupeaux de moutons. Invitez les élèves à observer ce qu’ils ont pendant quelques secondes. Ensuite, demandez-leur de fermer leurs yeux et de coucher leur tête sur leur table.

C’est la nuit, les gardiens dorment mais les loups rôdent. Vous êtes un de ces loups. Passez près de chaque troupeau et enlevez aucun, un ou deux mouton(s) par troupeau. Ajoutez-en un dans quelques troupeaux (naissance). Laissez aussi, près des troupeaux, une carte à jouer, face cachée, qui indiquera ce que vous avez fait grâce à un code très simple que vous modifierez pour chaque problème. Par exemple : cœur : aucun changement; carreau : un mouton de disparu; trèfle : deux moutons de disparus; pique : une naissance.

Demandez aux gardiens de troupeaux de se réveiller afin de vérifier si les loups ont mangé de leurs moutons. Qu’en pensent-ils ? Prenez note des réponses avant de mentionner aux élèves comment interpréter votre code. Avant de donner le second problème, dites-leur que votre code changera la prochaine fois.

Modifiez le nombre de jetons de chaque élève, respectez le maximum de six et … tout le monde au dodo, sauf le loup.

Cette fois, lors de la correction, demandez aux élèves de discuter de ce qu’il faudrait faire pour savoir si le nombre de moutons est inchangé. N’imposez pas de solution, laissez-les proposer leurs idées et les valider lors du prochain problème.

N’oubliez pas de noter les résultats, ceux-ci vous aideront à identifier les élèves qui ont développé des bases importantes sur le chemin de l’acquisition du concept de nombres.

Reprenez régulièrement cette activité tout en augmentant progressivement le nombre de moutons. En fait, la simple observation de quantités inférieures à neuf peut suffire pour réussir ces problèmes. Les élèves peuvent observer une configuration spéciale et s’en souvenir. Le dénombrement est alors inutile. Cependant, plus le nombre de moutons se rapprochera de la vingtaine, plus ce sera difficile.

On comprendra qu’une excellente stratégie consiste à former des modèles avec les jetons à surveiller. Par exemple, l’élève qui place ses six jetons, comme sont situés les points sur un dé, se donne une excellente chance de constater des changements. Et, lorsque les quantités augmentent, on peut faire des groupements identiques de quatre à six jetons, quitte à ce qu’il en reste deux ou trois tout près. Il suffit ensuite de «prendre une photo» et de tenter de la garder en mémoire … toute une nuit.

Le dénombrement est aussi une excellente stratégie, mais pensez aussi à une comptine dont chaque mot représente un mouton. Connaissant la comptine, il suffit de se souvenir du mot désignant le dernier mouton.

Une autre technique, similaire au dénombrement ou à la comptine, consiste à former une collection ayant le même nombre d’éléments qu’il y a de moutons. Une collection de perles dont on se fera un collier, par exemple.

Ne proposez aucune des stratégies précédentes tant que le nombre maximum de jetons ne dépassera pas douze et ce, même si peu d’élèves réussissent. Par la suite, s’ils n’ont pas proposé les stratégies mentionnées plus haut, faites-en la proposition et recommencez le jeu en leur demandant d’utiliser ces stratégies. Observez la progression de vos élèves.

À vous !

Robert Lyons