dimanche 23 novembre 2008

Mathadore (Numéro 293)
L’hebdomadaire gratuit portant sur l’enseignement des mathématiques

Sur la complexité (1)

L’apprentissage se déroule-t-il du simple au complexe ou, inversement, consiste-t-il à simplifier le complexe ?

J’ai eu le plaisir de montrer à marcher à mes enfants et à leurs enfants. Il faut voir leur concentration à ce moment. D’un à l’autre, il y a des différences, mais, dans chaque cas, il est clair que ce qui était d’abord extrêmement complexe est devenu rapidement une action d’une grande simplicité.

Rappelez-vous votre première heure au volant d’une automobile. Simple ou complexe ? Et maintenant ?

Voici, à gauche, une illustration du travail du cerveau d’un jeune adulte à sa première heure de jeu avec Tetrix. Et, à droite, l’aspect de son cerveau après plusieurs semaines d’entraînement. Cet entraînement lui a permis de réussir sept fois plus de lignes qu’à son premier essai et pourtant son cerveau travaille moins. L’échelle de couleur, indique que le blanc couvre les régions qui travaillent le plus alors que le noir indique celles qui sont inactives. Entre les deux, progressivement : rouge, jaune, vert, bleu,…

Il est clair que l’apprentissage réduit l’activité du cerveau. D’après Richard Haier, du centre d’imagerie cérébrale de l’université de Californie, à qui nous devons ces illustrations, chez les personnes reconnues très intelligentes, l’activité du cerveau est réduite plus rapidement. De plus, les personnes souffrant de déficiences intellectuelles ne réussissent jamais à réduire de façon importante l’activité de leur cerveau. Pour elles, leur vie ressemble à notre première heure de conduite d’une automobile. Épuisant !


Voici, à droite, l’illustration du cerveau d’une personne normale lorsque son cerveau est le moins actif. À gauche, celui d’une personne déficiente dans un moment comparable.

D’après l’illustration, il semble clair que l’apprentissage réduit l’activité du cerveau en remplaçant d’importants efforts de compréhension et de concentration par des automatismes. Si nous entendons par complexe ce qui provoque le plus d’activités au cerveau, l’observation directe du travail du cerveau montre qu’apprendre c’est simplifier le complexe. Il est difficile de contredire les observations objectives de la radiographie du cerveau, il semble que nous devons simplement en prendre acte.

Mais, si comprendre est plus complexe que reproduire ou même qu’exécuter fort efficacement, si notre cerveau, de façon naturelle et… automatique, travaille du complexe vers le simple, qu’en est-il lorsque nous essayons de le forcer à passer du simple au complexe ?

Savoir que, pour diviser un nombre par une fraction, il faut multiplier ce nombre par la fraction inversée et effectuer des divisions semblables n’est pas très complexe. Démontrer pourquoi diviser par deux tiers conduit au même résultat que multiplier par trois demies me semble plus complexe. Il me semble que c’est encore plus complexe de trouver des applications de la division d’un nombre par deux tiers. Quand, par exemple, la division de six mètres par deux tiers, dont le résultat est neuf mètres est-elle utile ? Combien faut-il effectuer de divisions de fractions afin de pouvoir démontrer, par exemple, que diviser par un tiers est équivalent à multiplier par trois ? Combien faut-il en faire pour en comprendre l’utilité ? Si un adulte, qui peut diviser depuis des années, n’a parfois besoin que d’un léger rappel pour diviser des fractions correctement, lui est-il aussi simple de démontrer la valeur de sa technique et son utilité ? Si notre cerveau fonctionne du simple au complexe, pourquoi n’y parvenons-nous pas ?

Chers lecteurs, à vous sur http://wwwmathadore.blogspot.com/

Robert Lyons

NOTE : Bien que j’apprécie recevoir vos commentaires par courriel, je vous encourage à les placer sur le blogue car la discussion sera beaucoup plus intéressante et plus enrichissante si chacun d’entre vous peut intervenir. Si nous voulons construire un programme ensemble, il ne faut pas exclure de lecteurs de discussions qui ne se dérouleraient autrement qu’entre vous et moi.

14 commentaires:

Marie a dit…

Très intéressant. Comment profiter de toutes les recherches accessibles et de plus en plus nombreuses sur le sujet afin de nous guider vers le réel avant de se lancer à bâtir un programme. Ma réflexion est la suivante: par exemple l'article paru en septembre 2008 dans la revue Québec Science sur les conséquences de la méthode globale en français est intéressante. Afin de remédier au problèmes actuels d'illetrisme, il suffirait "d'introduire les notions de décodage de façon beaucoup plus structuré qu'actuellement, des plus simple aux plus complexes.". Il est dit aussi que des enfants qui ont des problèmes de lecture auront de forts risques d'avoir des problèmes en mathématiques et autres matières, peut-on faire un lien avec l'apprentissage des mathématiques ? Donc que l'apprentissage devrait se faire du plus simple au plus complexe ? Sinon, pourquoi ?

Pierre Louis a dit…

Cet article du Québec Science était extrêmement intéressant. Il faut mentionner que les chercheurs cités dans cet article ont fait apprendre à lire une langue imaginaire à des candidats adultes. Certains apprenaient selon une méthode globale, basée sur la reconnaissance des «mots», alors que les autres candidats apprenaient selon une méthode s'apparentant à la syllabation. Ils apprenaient à décortiquer les mots en petits blocs. Les premiers étaient avantagés au départ mais les seconds les rattrapaient rapidement et prenaient rapidement une avance insurmontable au fur et à mesure que le nombre de mots augmentait. Les chercheurs, grâce à des images du cerveau, ont découvert que les premiers utilisaient une aire du cerveau réservée à la reconnaissance de formes alors que les seconds utilisaient l'aire du cerveau qui est spécialisée dans la lecture.

Bref, la méthode globale en lecture n'activerait pas la zone du cerveau qui est dédiée à cette activité ce qui menerait les apprenants avec une telle méthode à un échec. Conclusion: la syllabation est la méthode à montrer aux élèves qui apprennent à lire.

L'apprentissage se fait-il du simple vers le complexe? Ce semble être le cas pour la lecture. Serait-ce l'exception qui confirme la règle?

Caroline a dit…

Bonjour,
J'ai fait des études en anthropologie & ethnolinguistique. Nous y apprenions, entre autres, que l'être humain simplifie la complexité du réel, il se l'approprie. Par exemple, les cosmologies expliquent la naissance du monde. Elles partent donc d'un thème complexe (le Big Bang!)et le rende accessible à la compréhension du groupe.

Diverses théories anthropologiques expliquent le comment de la chose. Une d'entre elles est le structuralisme. Le structuralisme porte sur l'idée qu'il y a catégorisation du réel qui est faite pour rendre la réalité accessible, compréhensible et malléable. Cette catégorisation se fait selon une ou des structures d'opposition.
L'idée de Claude Lévi-Strauss provenait de la linguistique: À partir du continuum des sons, la langue extrait des sonorités. Elle procède à une différenciation des sons - qui est une simplification du réel - se faisant elle rend les sons ''utilisable'' pour la structuration des mots. En procédant à toute catégorisation, il y a nécessairement exclusion. Par exemple, en français en apprenant à faire le son A on exclue les variantes de ce son. Pour apprendre à faire A, il faut apprendre à ne pas faire des Non-A...
Ce qui revient à être une simplification du complexe ou dans ce cas-ci de la variabilité du continuum des sons.

Donc, le point de départ serait l'incompréhensible, le complexe, qui pour être approprié doit être simplifié à l'aide ''d'outils''; des sons, des mots, des contes et des chiffres?

Ces outils s'acquièrent un à un, selon des rythmes variables... Ce qui donnerait l'illusion de la nécessité de débuter avec le plus simple pour atteindre la compréhension ultime du complexe. Dans ce cas, l'outil osculte la finalité (ce qui n'est pas surprenant dans un monde à prédominance technologique!).

Or, il demeure qu'on comprend avec les mots (les outils) qu'on a et que ces derniers entâchent l'objet de compréhension.

Aussi, de l'anthropologie j'en retiens l'immense capacité d'adaptation du vivant. Ainsi, ces deux mouvements d'appropriation des connaissances, qui sont objectivement mesurés par l'imagerie cérébrale, sont probablement '' vivants '' et non mutuellement excusif.
La simplification comme instrument de compréhension du complexe me semble être une hypothèse raisonnable. Le contraire serait de la politique! (Oups!)

Qu'en pensez-vous?

D'un autre point de vue, personnel celui-là, cette hypothèse de simplification du complexe me parle énormément car j'ai l'impression de comprendre pourquoi je ne comprenais pas les mathématiques au primaire et au secondaire!
Une accumulation de connaissances simples dans le but inconnu et incompris de les appliquer ultérieurement sur des concepts complexes ignorés a priori ne me donnait pas la possibilité d'être active dans le prossessus d'acquisition des connaissances.

La satisfaction des efforts que procure un apprentissage dynamique - l'appropriation du complexe - ne m'arrivait tout simplement pas lors des travaux mathématiques (la mémoire n'étant pas une stratégie que j'ai développée). À l'époque j'ai plutôt optée pour la mathophobie! C'était illusoirement efficace...

J'ai par la suite découvert que la complexité humaine passait par le filtre de la simplification culturelle... Pour le dire simplement!
Aujourd'hui, grâce à mes enfants, je redécouvre les mathématiques dans cette perspective fort stimulante!

(Référence: Lévi-Strauss, Anthropologie structurale, 1974 Plon et Roman Jackobson pour la linguistique)

Gilles a dit…

Dans tout domaine, on retrouve des experts et le nôtre, l’apprentissage, n’échappe certes pas à cette réalité. Il y a toutefois deux pôles à l’expertise : la pratique et la théorie. Idéalement, l’expert devrait se situer entre ces deux pôles, c’est-à-dire qu’il s’intéressera autant à la recherche qu’à la pratique.

Il est assez clair que dans le domaine de l’éducation, le nombre d’enseignants qui s’intéresse aux résultats de recherches en éducation est assez faible et que bien peu de chercheurs passent le temps nécessaire à une réelle validation de leur théorie dans de vraies classes d’enfants.

Ceci m’amène à offrir un point de vue sur l’apprentissage de la lecture qui provient d’une experte dont les assises proviennent aussi bien de sa connaissance de nombreux résultats de recherches dans ce domaine, que d’une pratique d’enseignante engagée auprès de ses élèves du primaire. Elle n’est pas la seule, bien sûr, mais nous nous devons d’être prudents devant les écrits de supposés experts qui ne font que des recherches en laboratoire. Malheureusement, l’auteur de l’article sur l’apprentissage de la lecture paru dans Québec Science auquel réfèrent les deux premières réponses sur ce blog se situe dans cette catégorie. En fait, la chercheuse citée, madame Régine Pierre, ne fait aucunement l’unanimité auprès de ces collègues et je vous invite à lire le deuxième sujet de la page web suivante: http://www.iforum.umontreal.ca/Forum/ArchivesForum/2004-2005/040913/article3788.htm

Il ne fait aucun doute que ce que nous appelons la conscience phonologique (phonemic awereness) est un prédicteur essentiel de succès en apprentissage de la lecture, mais c’est loin d’être le seul. Le plus important est fort probablement la recherche de sens. Lire, c’est construire du sens, c’est s’appuyer sur des indices graphonétiques oui, mais aussi sur des indices syntaxiques et sur des connaissances antérieures. Nous avons tous vu ces messages reçus par courriel où les lettres des mots sont toutes mélangées. À quoi peut bien nous servir la conscience phonologique dans la compréhension de ces messages que nous réussissons d’ailleurs à lire, c’est-à-dire à comprendre, sans problème? Ou encore, qu’est-ce qui fait que je ne comprends rien de ce que je lis en espagnol, même si je décode pratiquement tous les mots de cette langue ? Jacqueline Giasson a écrit un excellent livre qui traite de tous les aspects de l’apprentissage de la lecture et il est clair que la méthode globale demeure indispensable et que malheureusement, dans la majorité de nos classes, la méthode syllabique est trop souvent utilisée. (Jacqueline Giasson, in « La lecture, de la théorie à la pratique », De Boeck, 1997)

L’apprentissage du simple au complexe ne pourra jamais, à mon avis, avoir de sens s’il demeure déconnecté de la réalité. Et comme être connecté à la réalité exige nécessairement d’être en situation relativement complexe, il est difficile d’imaginer un apprentissage procédant su simple au complexe qui puisse être transférable dans des situations de la vie. Précisons ici que complexe ne veut pas dire compliqué. Complexe veut dire qui fait appel à plusieurs aspects de la réalité. Pour moi, une tâche complexe c’est simplement une tâche authentique, une tâche qui a du sens, une tâche qui sollicite plusieurs parties de notre cerveau puisque la vie est ainsi faite. Que ce soit en mathématique ou en lecture, en éthique et culture religieuse ou en éducation physique, dans toutes les matières, nous nous devons de placer les enfants devant des situations, qu’elles soient ludiques ou pratiques, qui ont du sens pour eux et qui feront émerger des questionnements porteurs d’apprentissage. Ensuite seulement, pourra-t-il être justifié de proposer des exercices qui visent à mieux maîtriser une connaissance dont nous pouvons avoir besoin.

L’apprentissage du simple au complexe ne pourra donc jamais être d’une quelconque utilité si sa pertinence n’a pas été préalablement assurée par l’entremise d’une tâche plus globale qui a du sens pour l’apprenant. En somme, je suis en accord avec le dernier Mathadore et j’envisage avec enthousiasme d’entreprendre le travail de construction d’un programme qui procède du général au particulier et d’un apprentissage qui favorise la simplification du complexe par l’élève.

83521=17x17x17x17 a dit…

Je suis un père, fils d'un prof de maths décédé alors que j'avais 6 ans. Je ne sais pas si mon père (je n'en ai aucun souvenir) m'a "enseigné" les maths en jeune âge. Mon grand-père maternel était selon la légende une calculatrice humaine phénoménale. J'ai 3 enfants dont 1 avec des habiletés phénoménales en mathématique. À 4 ans spontanément multipliait et soustrayait.

Un fait demeure, je ne sais pas comment on nomme l'analphabétisme mathématique mais l'essentiel est que les futurs adultes de demain sachent compter efficacement mais surtout raisonner avec logique et rigueur. Les maths ne sont à mes yeux rien d'autre que le support langagier de la logique.

Développer un esprit mathématique est aussi important que la maîtrise de la langue. La conceptualisation mentale en mots et concepts chiffrés clairs, organisés et structurés la clé.

Pour ma part, la simple maîtrise de la numération et des 3 opérations est suffisante. J'ai bien dit 3...

L'outil de développement par excellence de la logique mathématique est simplement le magnifique jeu d'échecs. Bien au-delà de ce qu'on retrouve dans Défi Mathématique. Tout ce qui est nécessaire aux apprentissage scolaire à la mécanique mentale s'y trouve.

Gilles a dit…

Fort intéressant votre réponse, monsieur 83521. En passant, est-ce que le nombre 17 porté à la quatrième dimension possède un quelconque sens, outre le fait que votre nombre contienne l’ensemble des nombres de Fibonnaci inférieurs à 10 ?

Votre proposition de se limiter à la numération et aux trois opérations pour développer tout l’esprit mathématique à partir du jeu d’échec est séduisante et je me demandais si vous croyez que cela vaut pour toutes les personnes, ou si c’est votre façon personnelle?

83521=17x17x17x17 a dit…

M. Gilles, vous êtes perspicace. 17 est un nombre premier aux caractéristiques fabuleuses et Fibonacci aurait été séduit si la séquence numérique était exactement dans l'ordre. Mais c'est hors sujet. Merci pour le clin d'œil.

Le jeu d'Échecs est très simple. Cases de 2 couleurs. Pièces de 2 couleurs. 6 type de pièces. Chaque piéce posssède un seul et unique mouvement, exception faite du pion qui a l'allure d'un négligé mais en fait est l'élément le plus important des Échecs.

L'apprentissage des règles peut se faire par la majorité des enfants de 30 à 48 mois pour autant que l'aspect ludique de la chose soit mis en valeur et que la durée d'exposition ne dépasse pas 4-5 minutes à la fois, 1 ou 2 fois par jour durant environ 3 semaines. La suite selon la demande de l'enfant sans jamais pousser dessus.

Là où cela se corse et la majorité des adultes qui ne connaissent pas le jeu se font prendre au piège c'est la pseudo-complexité du jeu.

Si les règles sont simples, les combinaisons sont infinies mais la logique des séquences demeure implacablement simple. Rigueur et méthode mèneront à des résultats reproductibles.

Les Échecs sont à la fois un art et une science qui exploitent à la fois la mémoire, l'analyse, l'anticipation, l'imagination, la réflexion, la concentration et j'en passe.

L'exploitation de l'information est au cœur du jeu d'Échecs. Du point de vue spatio-temporelle, le jeu offre beaucoup de potentiel de développement.

Pour être franc, la compréhension des Échecs et l'analyse qui mène au processus de décision est en tout point supersposable à celui qui permet d'appliquer les règles grammaticales et syntaxiques complexes d'une langue comme le français. Montrez jeune à un enfant à jouer aux Échecs, je vous assure qu'il apprendra à se poser les bonnes questions avant d'écrire. Il apprendra à chercher le sens des mots d'une phrases et à retracer les idées clés derrière chaque paragraphe.

Une partie d'Échecs est telle une histoire où à tout moment, chaque pièce, chaque pion de chacun des clans joue un rôle précis qui varie au gré des coups joués. Chaque coup doit avoir une raison. Chaque coup modifie la dynamique en cours.

La compétence échiquéenne et non la maîtrise échiqueene mène à la maîtrise des outils inclus dans la boîte cranienne. Les connexions neuronales développées lors de l'apprentissage des Échecs ont une utilité dans le quotidien dans tous les secteurs.

Une suggestion de lecture, un livre de Garry Kasparov, La vie est une partie d'échecs. Ça ne traite pas de formation scolaire mais décrit et mets en relief les similitudes dans la price de décision dans la vie et dans une partie d'échecs.

Une lecture qui saura vous intéresser. Parle des Échecs et de l'école.

http://www.chess.ca/misc2008/benefitsofchess.pdf

Enfin, je sais qu'il y a actuellement une étude en cours (qui semble vouloir valider des études étrangères qui datent un peu) qui veut faire la démonstration de la valeur de l'utilisation des échecs à l'école pour améliorer le rendement scolaire, en prenant un groupe qui sera exposé aux échecs et un autre groupe témoin lui qui ne le sera pas et de comparer.

Quant à moi, les enfants devraient jouer aux échecs dès la maternelle 30 minutes par jour jusqu'à la 3ième année. Une fois qu'il apprendront à réfléchir et exploiter l'information, regardez le rythme d'apprentissage ensuite.

Tout cela est empirique et le temps me manque pour expliquer le tout.

Robert Lyons a dit…

Au sujet du jeu d'échecs, il est clair qu'il permet de développer diverses aptitudes mentales. Nous avons pu remarquer, entre autres, qu'il développe le sens de l'anticipation, lequel est essentiel afin de comprendre le but d'un emprunt en soustraction. En effet, pour effectuer 35 - 19 avec la technique des emprunts, il faut, après avoir constaté que 5 - 9 pose un problème, qu'en empruntant une dizaine et en l'ajoutant aux 5 unités isolées de 35, il y aura alors suffisamment d'unités pour en soustraire 9.
Avec le jeu d'échecs, l'anticipation devient non seulement pertinente, mais cette pertinence est rapidement perçue.

Ajoutons qu'il existe une théorie voulant que le jeu d'échecs ait été inventé afin d'enseigner des déplacements de base en géométrie. Prenez un carré de 25 cases et partez de la case centrale avec la tour. Vous pouvez atteindre huit cases. Faites de même avec un fou et vous pourrez atteindre huit nouvelles cases. Il reste exactement huit cases intouchées, lesquelles le seront par un cavalier.
Que cette théorie soit juste ou non, il est clair que le jeu d'échecs est probablement le jeu auquel on peut associer le plus d'apprentissages.

83521=17x17x17x17 a dit…

35-19=?

Ouais, ouais, ouais...

Pourquoi faire simple quand on peut compliquer? Emprunter à la dizaine pour créer 15-9 + 2 dizaines... Il faut encore avoir appris par cœur 15-9 ou visualiser les quinze items auquel on enlèvera 9 items et ensuite on comptera les 6 items restants.

D'où mon allusion aux 3 opérations et à la numérisation...

35-19 fait bien 36-20 et là l'opération se fait mentalement pour autant que le concept de la dizaine ait été assimilé.

Si on veut comprendre l'arythmétique simple. Rapidement après avoir expliqué et montré qu'une dizaine représente 10 unités. On passe à la droite numérique et on oublie le concept des emprunts. 35-19 = le parcours entre 35 et 20 + le parcours entre 19 et 200 et la soustraction avec retenue devient simplement une addition 15+1.

Idem pour la division qui en fait est une multiplication déguisée.

Prenons par exemple 2256 divisé par 12. Faire cette division par la méthode avec un crochet alors que nous rechercherons combien de fois entre 12 dans 22 et la séquence traditionnelle, longue et douloureuse (et à risque d'erreurs)est aisément remplacé par l'expression (2400-144)/ 12 soit 200-12 = 188 qui est largement plus simple lorsqu'on connaît sa table de 12 et qu'on a assimilé les principes de base des opérations et le sens des nombres.

17 c'est autant 10 + 7 que 20 - 3 que 5*3 + 7 que (50+1)/3

Une fois qu'on a compris qu'on peut jouer, oui JOUER avec les chiffres et les nombres, en autant qu'on respecte les régles, on sait qu'on peut se simplifier la vie...

Il y a des jours, je me dis, on montre aux enfants les mathématiques comme on nous les a montrées sans trop se questionner.

Les difficultés rencontrées sont sans doute liées à l'incapacité des maîtres à adapter l'information, la présenter sous un angle plus digeste. Soit par rigidité mentale, soit par absence de maîtrise de la langue mathématique. J'opte pour la 2ème hypothèse.

Je sais que ce message peut sembler provocateur et il ne se veut pas un manque de respect envers quiconque. Simplement un appel à la réflexion.

83521=17x17x17x17 a dit…

Vous excuserez les 2 coquilles.

Il fallait bien lire

5*2+7 et 19 et 20 et non pas 5*3+7 et 19 et 200

Robert Lyons a dit…

En mentionnant la soustraction avec emprunts, je voulais simplement signaler que la compréhension de cet algorithme exigeait une certaine anticipation, ce qui n'est pas nécessaire avec tous les algorithmes de soustraction. Ainsi, l'élève qui effectue 35 - 19 en calculant d'abord 30 - 10 = 20, ensuite 5 - 9 = -4 et finalement 20 - 4 = 16 aura réussi sans avoir recours à l'anticipation. J'ai vu deux enfants de sept ans, une fillette d'Iberville au Québec et une autre de Halifax en Nouvelle-Écosse, inventer cet algorithme.

Par ailleurs, il ne faut pas confondre une fonction et une opération. Ainsi, la fonction additive englobe deux opérations, l'addition et la soustraction, lesquelles peuvent être traduites par de nombreux algorithmes. Par ailleurs, la fonction multiplicative englobe la multiplication et la division auxquelles on peut ajouter la factorisation et l'extraction de racines et, là aussi, dans chaque cas, plusieurs algorithmes sont possibles.

Mais les algorithmes ne sont que des procédures résultant d'une bonne compréhension de l'opération et de la fonction impliquée. Si ce n'est pas le cas, il ne s'agit que de jeux symboliques. C'est justement à cause de l'apprentissage hors de contextes pertinents qu'une égalité telle 1$ divisé par une demie, laquelle donne 2$, est rarement comprise.

Enfin, de nombreux apprentissages ont souvent été déconnectés de la réalité ou, s'ils ont été connectés à la réalité, lorsque cette réalité a changé, les apprentissages n'ont pas été ajustés. C'est le cas de l'apprentissage des tables jusqu'à 12 qui a certainement été pertinent jusqu'à la fin des années soixante-dix mais qui ne l'est plus depuis.

Marie a dit…

Pour répondre à Gilles au sujet de la méthode globale.

Je crois que c'est un autre débat au niveau du français, mais c'est intéressant de voir encore la complexité du sujet du simple au plus complexe ou vice-versa dans l'apprentissage de la lecture et est-ce que ce débat peut nous guider dans l'enseignement des mathématiques ?

J'ai lu énormément d'ouvrages, je vais continuer de le faire, mais j'ai aussi mon expérience personnelle avec mes enfants (je fais l'école à la maison) et mon entourage d'une vingtaine de mamans faisant l'école à la maison et aussi des mamans (amies) ayant des enfants qui vont à l'école publique ou professeurs et ça coincide directement avec la méthode syllabique, du simple au complexe. Évidemment j'ai toujours lu des livres à ma fille qui sait lire des textes simples et comprend ce qu'elle lit (5 ans). Si vous saviez la détresse des parents actuellement avec la méthode globale, particulièrement avec les garçons... L'analyse des mots, la compréhension n'y est pas, ils photographient les mots tout simplement (mot étiquette) et ont beaucoup de difficulté de lecture ! (petite et patate sont souvent confondues !). Ils ne sont pas motivés car ils doivent apprendre par coeur ces mots sans intérêts pour eux. Donc je vois par mon expérience à temps plein avec des enfants dans 2 contextes différents les impacts négatifs de la méthode globale. Par contre oui, j'ai toujours lu des livres aux enfants, mais aussitôt que Maude a voulu apprendre à lire toute seule, j'ai fait une méthode syllabique toute simple et en quelques mois elle savait bien lire et elle comprend ce qu'elle lit... Même son de cloche pour mon entourage. Donc oui très d'accord qu'il faut la recherche et l'expérience sur le terrain, mais pour ma part je n'ai pas vu de grands succès avec la méthode globale, on n'a qu'à regarder ce que ça donne sur le terrain...

Gilles a dit…

Marie, vous faites certes un excellent travail auprès de vos enfants et je dirais que vous utilisez une méthode mixte en lecture. En fait, la méthode globale n’est aujourd’hui utilisée par personne. Les enseignants de nos écoles utilisent presque tous la méthode mixte et je ne comprends pas que l’on blâme la méthode globale pour les difficultés des enfants en lecture puisque cette méthode n’a jamais vraiment été utilisée en classe. Toutefois, il y a encore des enseignants qui enseignent surtout l’approche syllabique et cette méthode, utilisée hors contexte comme c’est souvent le cas, est la plus néfaste. Comme vous, je dirais de regarder ce que cela donne sur le terrain. C’est comme les dictées : la ministre veut les réintroduire alors qu’elles ont toujours été pratiquées par tous les enseignants. Les dictées traditionnelles n’ont aucun effet positif sur l’apprentissage des élèves. Aucun. Ce n’est qu’un moyen d’évaluation. Mais ce n’est pas moi l’expert en lecture ou en écriture, c’est mon épouse, et je préfèrerais ne pas trop poursuivre dans cette voie. Mon expertise personnele est en maths.

Je dirai simplement que les apprentissages hors contexte ne peuvent mener qu’au développement d’automatismes non transférables alors que des apprentissages qui prennent leur sens dans un contexte ne peuvent qu’être mieux intégrés par le cerveau.

Chabotf a dit…

De mon côté, je pense qu'il faut enseigner les maths comme elles ont été inventées. M. Lyon le répète souvent et d'autres didacticiens aussi. Les maths ont été inventées pour faciliter la vie de tous les jours, pour résoudre des problèmes, pour comprendre la vie quoi. Les maths, c'est une langue universelle et je crois qu'il faut l'enseigner comme tel.

Il reste à savoir : on part d'où pour arriver où ?